FR: Lectures de la semaine

Lectures terminées

Le tour d’écrou’ de Henry James

Cette (longue) nouvelle est considérée un classique et a connu pas mal d’adaptations. J’ai pas réussi à entrer dedans. En clair, je suis emmerdé et j’ai du me forcer pour aller jusqu’au bout et, en arrivant à la dernière phrase, ma seule réaction a été ‘Gné? C’est tout?’.

Pas réussi à éprouver la moindre empathie pour les personnages, surtout pas les deux enfants qui sont censés être en danger d’être ‘corrompus’ par ces deux méprisables fantômes. Ces enfants que je n’ai pas l’impression de les avoir jamais rencontrés, ou alors juste une pâle esquisse de ce que sont censés être des enfants de bonne famille, à l’époque. Je ne peux pas m’empêcher de penser que c’est un choix volontaire de James de ne pas entrer dans le coeur du sujet/de ces deux petits personnages pour que l’histoire ne devienne pas, soudainement, carrément beaucoup plus flippante et dérangeante pour ses lecteurs d’hier, comme d’aujourd’hui. Mais en même temps je ne comprends pas pourquoi il n’est pas entré plus franchement dans la tête de la gouvernante ?

Je veux dire, elle est au coeur de tout et hormis les enfants (mais eux sont AFK, ils n’existent pas du tout hors des moments où la gouvernante les surveille) c’est bien le seul personnage que j’aurais aimé le voir explorer davantage parce que vu la façon dont elle s’emballe au quart de tour et dont, sur base d’absolument presque rien, elle tire des conclusions et pose des jugements définitifs et sans appel c’est… disons que d’un point de vue psychologique ou même psychanalytique y aurait de quoi faire mais peut-être que là aussi James n’a pas voulu trop déranger ses lecteurs ? N’empêche, elle aurait mérité d’exister beaucoup plus. Cela dit, c’est très probablement moi qui suis passé à côté.

Lectures pas terminées

Rousseau, ‘Du contrat social’.

Ça fait du bien de se plonger dans ce texte classique au lieu de se contenter de penser le connaître parce que tout le monde connaît son titre et parle d’un air entendu de sa toute première phrase ‘L’homme est né libre, et partout il est dans les fer’.

J’ai pas fini le livre, malgré qu’il soit plutôt court parce que… il soulève tellement d’interrogations et de surprise en moi que je prends de km de notes et fais aussi pas mal de recherches pour mieux comprendre certaines idées, et du coup j’avance lentement (c’est pas une obligation de le lire comme ça). Cela dit, terminé ou pas, ce que je peux en dire sans attendre c’est que je n’avais aucune idée à quel point il était loin de la caricature bien pensante (et un peu niaise) que je m’en faisais. Très loin même et, aujourd’hui plus que jamais, ça me semble une lecture recommandée même si elle ne plaira pas à tout le monde, ou peut-être justement parce qu’elle ne plaira pas à tout le monde.

Proust ‘À la recherche du temps perdu

Ok, avec ce roman j’en ai pour des mois de lecture et je n’en parlerai probablement pas beaucoup d’ici là. Ce que je peux dire, c’est que ça fait plus de trente ans que j’essaye régulièrement de ’lire Proust’ sans jamais y arriver. Sauf cette fois.

Et c’est une révélation. Je peux enfin apprécier pourquoi certains considèrent la Recherche comme un des plus grands romans, si pas le plus grand roman. Peut-être parce que je vieilli, mais en le prenant j’ai pour la première fois réussi à me calquer sur le rythme, à la fois très lent et incroyablement vif et riche, de la phrase de Proust. À suivre ce qui m’avait toujours semblé être un tas de pensées disparates mais surtout et avant tout un tas confus de souvenirs qui s’emmêlaient les uns les autres sans faire beaucoup de sens et qui en réalité est un putain de chef-d’œuvre de maîtrise de la part de Proust.

Je veux dire que chaque phrase, chaque souvenir brièvement évoqué — je suis toujours dans la premier volume, Du côté de chez Swann, pour info — qui arrive comme quelque chose d’apparemment insignifiant ou de peu d’intérêt si pas complètement WTF, va se révéler significatif et utile, faisant écho à une autre chose bien plus loin ou à exactemetn la même scène vue avec un angle légèrement différent, comme une phrase qui aurait été interrompue et reprendrait à la virgule prêt ou avec une infime variation, des pages et des pages plus loin. Et ça marche. Et du coup on peut facilement, avec une gourmandise joyeuse en ce qui me concerne, se précipiter des dizaines de pages en arrière pour retrouver ce bout de phrase, cette mention dont on se souvient que le narrateur l’avait faite en passant et réaliser que, oui, encore une fois, Proust n’a rien laissé au hasard et rien n’est jamais ‘en tas’ dans son roman. Rien. Techniquement, je suis bluffé qu’un type malade, qui écrivit à la plume sur du papier (pas que je me sente proche de lui, pas du tout hein) ait pu tenir autant de fils disparates et les tisser avec une telle précision et les coordonner pour faire un ensemble qui existe et qui sonne si juste. Pparce que bon, sans surprise, son texte est aussi musical qu’il est pictural et, efin, après trente ans, même une brute épaisse de mon genre parvient à l’apprécier. Et c’est peu de le dire.

Edit: je réalise que cette semaine je n’ai à peu près rien lu en anglais. Une première.

Published: 2025/02/08